Le ministre Graham a lancé un Dialogue sur la politique étrangère le mercredi 22 janvier 2003 en publiant un document de réflexion. Le Dialogue vise à faire participer les Canadiens aux échanges sur la politique étrangère du Canada.

Le présent compte rendu résume les observations et les recommandations reçues entre le 12 et le 18 mars 2003. Ces communications sont issues des assemblées publiques tenues par le Ministre et des tables rondes spécialisées et comprennent aussi la correspondance envoyée au Ministère et les échanges qui ont marqué les débats électroniques (le site Web est coordonné par le projet de byDesign eLab et de eCommons/Agora électronique).

Réponses par Internet au document de réflexion du ministre :

Thèmes principaux

Le conflit en Irak est le thème qui domine dans les discussions électroniques et la correspondance du Ministre. Certains participants craignent que les mesures prises par les États-Unis pour empêcher le terrorisme comprometteront l'élaboration des politiques canadiennes et, plus précisément, les droits de protection des renseignements personnels des citoyens.

En ce qui concerne la paix et la sécurité internationale, les participants font valoir que l'aide canadienne au maintien de la paix et au développement devrait se limiter aux pays qui en font la demande.

«Dans le document, il est mentionné que le Canada a besoin de « forces militaires capables de défendre le pays et d'appuyer sa politique étrangère hors de ses frontières » pour assurer sa sécurité. Étant membre actif des Forces canadiennes depuis vingt ans, j'estime être à même de déclarer, avec un degré de certitude, que nous sommes à mille lieues de posséder cette capacité.»

« Les mesures militaires n'augmentent PAS la sécurité. Dans bien des cas, elles ont l'effet contraire. Les Israéliens sont-ils plus en sécurité depuis qu'ils ont mis en place les mesures répressives actuelles? Les Américains sont-ils plus en sécurité depuis la campagne qu'ils ont menée en Afghanistan? »

« Depuis notre adhérsion au libre-échange et à l'internationalisation, nous avon renonce aux principes humanitaires pour des dollars. »

« Le Canada devrait s'efforcer d'entretenir des relations avec tous les pays, peu importe leur statut de puissance mondiale, pourvu que ces relations ne compromettent pas notre position en tant que pays faisant la promotion du respect de l'égalité et de la diversité. »

« En matière de politique étrangère, les gouvernements de toutes les démocraties occidentales devraient avoir comme priorité d'inciter les régimes oppressifs à devenir responsables à l'égard de leurs citoyens et à gérer le pays dans l'intérêt de ceux-ci. »

« Qu'est-ce que la culture canadienne? Le Canada est un pays peuplé de gens aux cultures, aux origines ethniques et aux convictions religieuses différentes. Et c'est un avantage. Malheureusement, nous n'avons pas réussi à établir, à développer ou à déterminer des valeurs, des croyances ou des traditions qui définissent l'identité « canadienne ». C'est triste, car cela signifie que nous avons été incapables d'encourager ou d'inspirer nos propres citoyens à s'unir et à s'identifier les uns aux autres sur un terrain d'entente quelconque. »

« À mon avis, le troisième pilier - diffusion des valeurs et de la culture canadiennes - est le plus important. Vivre à l'extérieur du Canada m'a fait prendre conscience de l'importance que revêt l'identité canadienne pour la communauté internationale. Les gens du monde entier que je rencontre nous considèrent comme des gens pacifistes et amicaux qui respectent l'environnement et, par-dessus tout, les gens qui ont des origines culturelles différentes. »

VUE D'ENSEMBLE

RÉACTION DU PUBLIC AU DIALOGUE

« Vous nous avez demandé nos opinions. Maintenant, il n'en tient qu'à vous de les lire, d'en tirer des enseignements et de façonner la politique canadienne à partir de celles-ci - et non pas de les utiliser de façon sélective pour appuyer les idées que défend actuellement le Ministère. N'est-ce pas cela la démocratie? »

OBSERVATIONS SUR LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE

• « En lieu et place des trois piliers actuels, je suggérerais la santé et la sécurité, la protection de l'environnement, la justice économique, la justice légale, et la gouvernance responsable et démocratique. »
• « Ce qui fait quelque peu défaut c'est... les efforts déployés pour veiller à ce qu'il y ait suffisamment d'interaction entre les trois piliers qui, en ce moment, ressemblent davantage à des tuyaux de poêle qu'à des piliers soutenant une structure efficace. »
• « De tous les secteurs de politique, c'est dans celui des affaires étrangères que les dirigeants du pays ont la plus grande influence sur la population. Une déclaration percutante, rapide, rassurante et sans équivoque suffit dans bien des cas à influencer l'opinion publique, et ce, dans les deux sens. »
• « Certaines déclarations [dans le document de réflexion] telles que [aucune relation] « ne dépasse en importance celle que nous entretenons avec les États-Unis, notre principal allié » et plus précisément « parce que la puissance et l'influence des États-Unis sont sans égales » me font prendre conscience, ainsi qu'au reste du monde probablement, que nous fondons notre politique étrangère sur notre dépendance et notre peur des États-Unis, plutôt que sur les intérêts, les cultures et les croyances des Canadiens. »

Tendances

• La majorité des participants ont une opinion positive des trois piliers. Toutefois, certains laissent entendre que le Canada pourrait déployer davantage d'efforts pour rendre les politiques relatives à chacun des piliers plus efficaces, et améliorer les relations entre les piliers. Tendances - suite.
• Selon certains, le commerce et l'économie ont une influence disproportionnée sur l'élaboration de la politique étrangère par comparaison avec la justice et les droits de la personne.

Opinions

• La politique étrangère du Canada devrait viser à améliorer le monde, et non pas seulement le Canada, et s'appuyer sur des objectifs à long terme.
• Il faudrait prêter une plus grande attention à l'Afrique et aux affaires circumpolaires.
• Le Canada devrait créer un Centre mondial de politique étrangère, au sein duquel les délégués internationaux prendraient part à des discussions de politique s'inspirant des trois piliers de la politique étrangère canadienne.

RELATIONS ENTRE LE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS

Tendances

• Certains participants se disent inquiets du fait que les États-Unis se comportent comme un « tyran » dans les affaires internationales et craignent que la politique étrangère américaine soit une menace pour la culture et la souveraineté canadiennes.
• D'autres condamnent l'antiaméricanisme, soutenant qu'il est « myope, peu constructif et qu'il nous diminue en tant que nation ».
• Sur le plan économique, le Canada dépend beaucoup trop du commerce. Cette dépendance rend l'élaboration des politiques canadiennes vulnérable aux pressions excessives des États-Unis.

Opinions

• Le Canada ne devrait pas laisser les préoccupations américaines relative au terrorisme, dominer son programme d'action.
• Le Canada devrait se distancier de la politique étrangère américaine, car l'approche actuelle entraînera d'autres activités terroristes.
• Les Canadiens devraient faire la distinction entre les citoyens américains et les politiques américaines.

LA PAIX ET SÉCURITÉ INTERNATIONALES

L'Iraq

• « Si l'exécution des résolutions des Nations Unies exige le recours à la force, alors soit. Nous nous attendons à ce que la force soit employée pour soutenir notre système juridique civil; pourquoi les dirigeants des pays devraient être traités différemment? »

Autres questions abordées

• Les États avortons ou défaillants contribuent de plus en plus à l'insécurité mondiale. Le Canada devrait utiliser son expérience de la reconstruction après un conflit pour accroître la capacité et l'efficacité de ces États avant qu'ils ne sombrent.
• Le Canada ne devrait contribuer aux efforts de maintien de la paix ou aux corps de bataille que lorsqu'il y a entente internationale (sanction de l'ONU) ou lors d'une crise manifeste (Rwanda).

FORCES MILITAIRES

Tendances

• Les participants soutiennent que les Forces canadiennes n'ont pas la capacité de s'acquitter de leurs obligations nationales et internationales. L'équipement médiocre, notamment les hélicoptères Sea King, nuit à la réputation du Canada auprès de ses alliés et empêche le Canada de jouer un rôle pertinent dans les affaires internationales.

Opinions

• «Les Forces canadiennes devraient s'occuper principalement du maintien de la paix à l'étranger et bénéficier de plus de ressources pour défendre le Canada.
• Le Canada doit veiller à ce que son matériel et son personnel soient entièrement interopérables avec ceux des États-Unis et de ses autres alliés.
• Le Canada devrait faire en sorte que son armée soit assez grande et qu'elle ait les ressources nécessaires pour contribuer de façon proportionnelle à la paix et à la sécurité internationales.
• Les Forces canadiennes devraient collaborer à la formation du personnel militaire dans les pays en développement et aider ceux-ci en « temps de catastrophes naturelles et de nécessité ». Le Canada devrait exporter son modèle d'armée à commandement démocratique.
• Le ministère de la Défense nationale devrait accroître sa coordination des politiques et sa coopération avec le MAECI et l'ACDI.

LE COMMERCE ET LA PROSPÉRITÉ

Tendances

• La majorité des participants continuent à penser que le Canada est trop dépendant des États-Unis sur le plan économique et qu'il doit diversifier ses partenaires commerciaux.
• L'ALENA favorise les États-Unis et ne protège pas l'accès du Canada au marché américain comme il est censé le faire.

Opinions

• Le Canada devrait favoriser le commerce avec l'UE afin de diminuer sa dépendance économique à l'égard des États-Unis.
• Le Canada devrait promouvoir l'investissement canadien en Chine et en Inde, tout en veillant à ce que les entreprises qui ont des activités dans ces pays respectent les normes du travail en vigueur au Canada. Il pourra ainsi augmenter la prospérité et donner un exemple positif.
• Il faudrait accorder une attention accrue aux affaires du Nord, consacrer des ressources au règlement des problèmes de l'Arctique puis exporter notre expertise dans le monde circumpolaire.
• Le Canada devrait ouvrir son commerce de produits agricoles aux pays en développement et éliminer les tarifs douaniers sur les marchandises en provenance des PED.
• Le Canada devrait mettre un terme aux relations économiques et commerciales qu'il entretient avec des pays reconnus pour violer les droits de la personne.

Aide à l'étranger

• Le Canada devrait accroître l'aide à l'étranger et l'aide directe offertes aux pays stables qui l'utilisent efficacement et aux fins prévues.
• L'aide pourrait être axée sur une ou deux régions, être destinée à la bonne gouvernance, à l'infrastructure, à la santé et à l'éducation, et avoir un effet durable.
• En plus de son aide financière, le Canada devrait exporter sa structure fédérale et son équilibre assez réussi entre les droits des individus, des minorités et des majorités.

VALEURS ET CULTURE

Tendances

• Les valeurs présentées dans la politique étrangère actuelle sont des « valeurs canadiennes synthétiques créées par les gouvernements et les élites universitaires ces trente dernières années ».
• Le gouvernement ne déploie pas assez d'efforts pour promouvoir la culture canadienne à l'étranger.

Opinions

• Le Canada devrait renforcer ses liens avec l'UE, car les valeurs canadiennes sont plus en harmonie avec celles de l'Europe qu'avec celles des États-Unis.
• Le Canada devrait promouvoir les valeurs canadiennes à l'étranger de façon plus énergique, particulièrement la démocratie, et devrait leur accorder une grande importance au pays afin de donner l'exemple. Le Canada ne critique pas assez ouvertement les violations des droits de la personne commises dans des pays comme l'Arabie saoudite.
• Un des piliers de la politique étrangère du Canada est la promotion de la culture canadienne. Toutefois, le MAECI ne consacre pas suffisamment de ressources à cette activité.
• Le Canada devrait accroître le financement public accordé aux arts et appuyer les échanges culturels de personnes et d'idées.
• Il faut sensibiliser davantage les Canadiens au travail et aux réussites de leurs pairs à l'étranger.

Interculturel/interconfessionnel

• Le Canada devrait favoriser la compréhension des différentes cultures et religions, car le manque de connaissances ne fait qu'accroître la peur, la méfiance et la possibilité que des groupes agissent de façon irrationnelle et agressive envers d'autres.
• Le Canada devrait susciter une plus grande tolérance entre les nations et les groupes ethniques, mais ne devrait pas intervenir dans des questions de religion. « Il est impossible pour notre gouvernement d'élaborer des politiques fondées sur des morales et des convictions religieuses et de représenter en même temps les intérêts de tous les Canadiens ».